M.O.T Un certain 26 juin de mon enfance, le facteur apporta un colis qui m’était destiné. Expédié par une marraine avisée, il arrivait pile le jour de mon anniversaire. Petit paquet, grandes espérances. Hélas, l’emballage de kraft ficelé serré, patiemment ouvert, ne laissa apparaître qu’une douzaine de mouchoirs, tous identiques.

De fines rayures bleu-violet bordées de jours alternés composaient un cadre et, dans l’espace central ainsi circonscrit, en bas à gauche, apparaissaient, en lettres capitales italiques, mes initiales.

La déception céda aussitôt la place à la perplexité.

Marie-Odile Treps était devenu MOT.

La réduction de mon nom avait produit un vocable, ce vocable-là, mot.
Ce mot-là, si purement tautologique qu’il se désigne lui-même. Ce mot-là, élu entre tous pour représenter chacun de ceux que, de A à Z, le dictionnaire inventorie prudemment. Ce mot-là, créé pour contenir l’immensité de ceux que les humains combinent follement.

Trois lettres pour évoquer la rumeur du monde. Le plus abstrait de tous les mots pour faire surgir l’infinie réalité.

MOT… Trois lettres violettes brodées sur un linon immaculé. Comme une signature tracée à l’encre sur une feuille de papier.

Le troublant cadeau de marraine Madeleine a ouvert mon imaginaire à l’univers des mots...

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